Couscous, étymologie

On soulignera aussi que le terme présente, de manière
généralisée, un trait morphologique tout à fait remarquable pour un nominal
berbère : l’absence de la voyelle initiale (a-). Or, cette caractéristique,
sauf dans les cas d’emprunts non intégrés, est un indice net d’archaïsme,
propre à quelques nominaux référant à des réalités non-dénombrables,
non-segmentables (Chaker 1995).

aseksut (a-seksu-t)
: "couscoussier" ; au plan de sa morphologie, le nom de cet ustensile
culinaire à une forme parfaitement berbère et porte un suffixe –t, indice très
net, là aussi, d’une formation ancienne.
berkukes (nominal)
et son féminin, taberkukest : "couscous à gros grains" ; ainsi que le
verbe berkukes : "être en gros grains".
La seconde forme est évidemment à analyser comme un composé
expressif à préfixe ber-, à valeur augmentative, parfaitement bien établi (Cf.
Chaker 1972-73) ; le thème se décompose donc en ber-kukes. Le composant kukes
est, sans aucun doute possible, une forme expressive à redoublement de la première
radicale (Chaker 1972-73). Ce qui permet de poser une racine *KS qui pourrait
être à l’origine de tous ces lexèmes.

Sous réserve d’une vérification lexicographiques plus poussée,
la racine *KS ne semble pas avoir, en synchronie, de représentation immédiate.
Elle n’apparaît que sous ses formes dérivées expressives, à redoublement
partiel ou total (KS > ksks ; *KS > kukes ; *KS > sksu).
La dernière forme, la plus largement attestée à travers le nom
même du couscous, pourrait en fait être un dérivé à préfixe
(factitif/instrumental) s- sur la base *KS ; seksu, s’analysant alors en s-ksu.
J’ai personnellement relevé en kabyle un adjectif imkeskes,
"bien roulé, bien formé" (non attesté dans les dictionnaires
existants), qui pourrait permettre d’attribuer à cette racine *KS une
signification du type "bien formé", "arrondi"…
Le seul point obscur reste donc la morphologie précise de
seksu, mais tout un faisceau d’indices et de données confirment la thèse de
l’origine locale, ancienne et berbère du mot couscous.
Une hypothèse qui semble évidente à tout locuteur du parlers
Tachelhit est que le mot est composé du verbe "sek" (touiller) et du
verbe "su" (boire).
Adapté de l'article de Salem CHAKER
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